Entre 235, 407 et 306 milliards de francs Cfa, l’Etat semble se perdre dans ses chiffres pour dire le coût réel de l’Aéroport international Blaise Diagne de Diass (Aibd), achevé après 10 ans de travaux.
Opération camouflage ou saupoudrage ? En tout cas, un flou artistique entoure cette facture payée par des voyageurs à travers la Rdia de 54 euros par passager collectée depuis plus de 12 ans et censée tout rembourser.
On ne sait plus à quel chiffre se fier. Entre les 235 milliards de francs Cfa annoncés par Karim Wade en 2007, les 407 milliards évoqués par l’actuel régime il y a un an et les 306 milliards de francs Cfa fournis hier par le pilote de l’aéroport, difficile de dire exactement combien nous a coûté l’Aéroport international Blaise Diagne de Diass (Aibd). Lequel sera inauguré dans deux jours. En effet, hier encore, le directeur de l’Aidb, Abdoulaye Mbodj, a donné un autre chiffre controversé de cette infrastructure qui devra être inauguré jeudi par Macky Sall. Il a indiqué lors d’une rencontre avec la presse que le bijou va coûter 306 milliards de francs Cfa, manipulant allégrement les chiffres du coût réel de l’infrastructure financé par les taxes sur les billets des passagers vers le Sénégal.
En pleine saison de gavage, les autorités ont même perdu leur latin pour éclairer la lanterne des journalistes. Sans craindre le ridicule des Sénégalais qui suivent ce feuilleton depuis dix ans, le patron de l’Aibd assure que des avenants sont venus pimenter la facture du constructeur. Ce, alors que dans le contrat initial, l’entreprise choisie devrait faire les «études, les travaux et l’équipement de l’aéroport». Mais, dit-il, à cause d’imprévues comme la révision du prix du baril du pétrole ou encore le déplacement des villages situés dans l’emprise du chantier, les deux parties avaient convenues de 3 avenants de 70 milliards de francs Cfa auxquels viendront s’ajouter 31 autres milliards du Budget consolidé d’investissement (Bci) et des intérêts payés à des banques avec les intermédiations, selon M. Mbodj. Lequel jure, en définitif que l’aéroport coûtera 306 milliards de francs Cfa alors qu’il avait déjà fourni, sur un plateau de télévision, le chiffre de 407 milliards de francs Cfa. Mais, selon Maïmouna Ndoye Seck, si on en est arrivé à ces surcoûts, c’est parce que l’aéroport est né avec «des tares congénitales».
Financé avec la Redevance de développement des infrastructures aéroportuaires (Rdia) instauré en 2005, l’aéroport devrait néanmoins être définitivement remboursé sous peu, si on en croit les affirmations de Abdoulaye Mbodj. Il a, en effet, indiqué que plus de 200 milliards de francs Cfa ont déjà été collectés et ont permis de rembourser une bonne partie des prêteurs. «Actuellement, nous avons à la banque 70 milliards de francs Cfa pour les remboursements. Si le rythme de trafic de Léopold Sédar Senghor est maintenu, on devrait totalement rembourser d’ici 2024 ou même 2022, en fonction des prévisions sur Diass», a indiqué le directeur de l’Aibd. Ce qui permettrait de réduire de 54 euros, les prix des billets d’avion sur l’international et 2 euros sur les vols internes, conformément aux décrets qui l’instaurent.
Seyni DIOP