Le chef de l’Etat a procédé, avant-hier jeudi, à la pose de la première pierre de l’Arène nationale. Pendant ce temps, l’hôpital «Dalal Jamm» de Guédiawaye attend, depuis près de treize ans, une inauguration souvent annoncée mais jamais réalisée, au grand dam des populations qui, lasses d’attendre, menacent de manifester.
La ministre de la Santé et de l’Action sociale, Awa Marie Coll Seck, a été formelle. Après plusieurs reports, le nouvel hôpital «Dalal Jamm» de Guédiawaye va être opérationnel durant le premier trimestre de l’année 2016. « Je ne peux pas avancer une date exacte. La preuve en est que l’hôpital devait être ouvert l’année dernière, mais il y avait des problèmes avec les bailleurs de fonds. Maintenant, toutes les difficultés ont été levées en vue de son ouverture durant le premier trimestre de 2016», avait-elle expliqué, en marge de la cérémonie de réception d’une unité mobile de dépistage du cancer tenue vendredi 6 novembre 2015. Poursuivant, Awa Marie Coll Seck avait assuré : «Maintenant, tous les bailleurs de fonds vont s’employer à payer l’argent restant. Nous avons des promesses fermes que d’ici à la fin de l’année, les équipements seront sur place.»
Seulement, malgré l’importante contribution de l’Arabie Saoudite qui a débloqué la rondelette somme de 7,5 milliards de francs Cfa et les sérieuses assurances d’Awa Marie Coll Seck, l’infrastructure n’est toujours pas fonctionnelle. Pourtant, l’établissement public de santé (Eps), qui ne reçoit toujours pas le moindre patient, a un directeur qui a été nommé depuis le 23 juin 2003 par le décret n° 2003-451 du 23 juin 2003 portant création du projet de l’Hôpital «Dalal Diam». Le même décret renseignait que « le Directeur général a pour mission d’assurer, pour le compte de l’Etat, tous les contacts avec le Royaume d’Arabie Saoudite, partenaire financier, de préparer et de lancer les d’offres, de mobiliser les financements et de suivre la réalisation de l’hôpital ». Le président Abdoulaye Wade, qui avait signé ce décret, aura passé après près d’une décennie à la tête de l’Etat sans que le directeur grassement rémunéré ne parvienne à équiper et à rendre opérationnel cette structure sanitaire implantée sur le site du Golf de Cambérène et grandement convoitée par les populations.
L’arrivée au pouvoir de Macky Sall ne va rien changer. Après avoir dégommé Ada Camara NDIAYE qui est restée longtemps à la tête de la structure sans être poussée à faire valoir ses droits à une pension de retraite, le président va manifester un véritable manque d’intérêt pour cet hôpital en nommant à l’issue du Conseil des ministres du 7 mai 2014, le Docteur Youssou Ndiaye. Ce dernier a été épinglé par un rapport d’audit particulièrement salé produit par l’Inspection des affaires administratives et financières (Iaaf) alors qu’il présidait aux destinées de l’hôpital Abass Ndao de Dakar. « Les tensions de trésorerie ont comme conséquences entre autres, les ruptures fréquentes de consommables dans tous les services, entraînant l’établissement de Conventions (avec l’Assad), signées en violation de la réglementation et qui bénéficient à quelques personnes au détriment des autres agents et des usagers de la structure. Cette situation de sinécure perdure avec l’instauration de caisses parallèles, entraînant une déperdition de recettes», avaient relevé les auditeurs. Pour de nombreux observateurs, cette nomination de Dr Ndiaye est une rétrogradation d’un membre de l’Alliance pour la république (Apr) ne pouvant être envoyé en taule. Après plus d’un an passé à la tête de la structure sanitaire sans réussir à la rendre opérationnelle, le Docteur Youssou Ndiaye va encore migrer, «appelé à d’autres fonctions» par Macky Sall le 29 juillet 2015.
L’ouverture de cet hôpital souvent annoncée mais jamais réalisée conjuguée à l’instabilité des directeurs a fini par exaspérer les populations de la banlieue. Pour ces dernières, l’Etat du Sénégal est plus prompt à construire une arène ou un stade dans la banlieue. Mais quand il s’agit d’université, de lycée ou encore de structures sanitaires, les autorités tournent les pouces, ne manifestant aucune volonté. D’après nos informations, des concertations ont été initiées et les banlieusards, déterminés à ne plus accepter le divertissement que les gouvernants leur proposent comme seule porte de sortie. Pour beaucoup, il n’est pas question de laisser l’hôpital fermé pendant qu’une arène de 32 milliards est construite dans la banlieue.
Si le leader de l’Apr et ses partisans ont cru, en posant la pose de la première pierre de l’Arène nationale, avoir mis les populations de la banlieue dans leur poche, ils sont avertis.
Mame Birame WATHIE