En refusant de démissionner, une heure après l’annonce de son inculpation pour des faits de corruption, de fraude et d’abus de confiance, jeudi 21 novembre au soir, Benyamin Nétanyahou a ouvert une crise abyssale de la démocratie israélienne.
C’est la première fois qu’un chef de gouvernement en exercice affronte ainsi la justice, en restant au pouvoir. M. Nétanyahou a allumé un brasier en guise de contre-feu : il entend faire publiquement le procès de ses juges et des enquêteurs de police.
La mine grise, le ton posé, s’autorisant ici et là un sourire de mépris, le premier ministre a renversé, seul face à une unique caméra de télévision, la formule consacrée qui figure en tête de son acte d’accusation : « L’Etat d’Israël contre Benyamin, fils de Benzion Nétanyahou. » C’est lui au contraire qui dénonce « une tentative de coup d’Etat contre un premier ministre, sur la base de fausses accusations ». C’est lui qui exige la création d’une commission d’enquête indépendante, contre ses procureurs et contre les officiers de police qui ont échafaudé ce dossier, depuis 2016. Quant à ses partisans, il leur revient de descendre dans la rue pour « exiger que l’on enquête sur les enquêteurs ».
« Une méthode » pour l’abattre
Ces fonctionnaires « malhonnêtes », « dirigés par des éléments extérieurs » que M. Nétanyahou ne nomme pas, se sont engagés, déplore-t-il, dans « un processus d’usure ». Relayés par une presse hostile, ils suivent « une méthode » pour l’abattre. « Chaque soir, on fait couler mon sang et celui de mon épouse et de mon fils, dit-il. Dans quelle démocratie, dans quel Etat de droit vivons-nous ? »
Jamais un premier ministre n’avait attaqué avec une telle violence les institutions. Mais il avait dessiné sa défense de longue date. Le procureur général du pays, Avichaï Mandelblit, s’y attendait. En déroulant son acte d’accusation devant la presse, une heure auparavant, il a consacré l’essentiel de son allocution à défendre la légitimité de son enquête.
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