Moubarak Lo se renie sur toute la ligne. Dans un long entretien accordé à Wal Fadjri, l’ancien directeur de cabinet adjoint du président de la République qui dénonçait les «connivences réelles» entre le chef de l’Exécutif et les lobbies affairistes, accepte maintenant de devenir conseiller du Premier ministre. Pire, il accusait Macky Sall d’être sous l’influence des hommes d’affaires.
«Il y a beaucoup de centres d’intérêt périphériques au cœur de l’Etat qui influencent les décisions présidentielles. De toute façon, pour les hommes d’affaires, c’est clair. C’est Diagna Ndiaye. Il n’aurait jamais dû être influent dans un régime qui veut aller de l’avant. Je ne sais pas ce qu’il peut conseiller de bien au président de la République. C’est une question que je me pose», disait-il. Ainsi, celui qui reprochait à Macky Sall de ne pas écouter ses conseillers, devient conseiller du chef du gouvernement. «C’est une tare congénitale…Ayant été directeur de cabinet adjoint, elle (Amsatou Sow Sidibé) n’a rien dit que je ne connaissais», déclarait Moubarak Lo, ajoutant que les intellectuels ne peuvent pas être à l’aise avec le président de la République pour expliquer sa rupture d’avec le chef de l’Etat. En outre, Moubarak Lo accusait le chef de l’Apr d’être obnubilé par un second mandat et de passer tout son temps à faire de la politique politicienne. «C’est comme si lui il préfère, sur la journée de huit heures, passer les quatre heures à faire la politique avec ses cercles périphériques plutôt qu’avec ses conseillers». Ainsi, on le voit, il se renie sur toute la ligne. Il accepte de se rabaisser en devenant conseiller de l’exécutant de Macky Sall. Pire, il accepte de se mortifier en passant de directeur de cabinet adjoint du président de la République à celui de simple conseiller du Premier ministre. De directeur de cabinet adjoint, il devient conseiller de l’exécutant de celui qu’il vouait naguère aux gémonies. Par la même occasion, il reconnaît de facto au chef de l’Apr sa double casquette de président de parti et de président de la République. Une chose qu’il critiquait récemment. «Je ne suis pas d’accord pour que le président de la République soit chef de parti parce que effectivement cela ne vous permet pas d’avoir l’équilibre des différentes sensibilités du pays», disait-il. «Le Président Macky Sall, s’il a une journée de dix heures, les neuf doivent être consacrées au service de l’Etat, à des réunions stratégiques. Mais, si l’essentiel est consacré à l’animation de sa prochaine campagne, cela m’inquiète. C’est comme si son seul souci, c’est de durer au pouvoir», raillait Moubarak Lo non sans dénonçait les scènes «très cocasses» qui se passaient au palais avec 200 ou 300 responsables de l’Apr dans la grande salle de la présidence à attendre le Président. «Il est trop obnubilé par la politique politicienne. Ce qui fait qu’il perd l’essentiel. (…) Macky Sall a manqué de préparation à la fonction présidentielle. On ne sent pas une ligne de force dans sa manière de fonctionner», faisait-il remarquer. Il se renie, mais c’est ainsi la politique au Sénégal. D’autres avant lui se sont reniés. Charles Gaiky DIENE