A l’instar de beaucoup de quartiers de la capitale, Grand-Yoff vit un calvaire quotidien.
Ce, à cause de la rareté de l’eau qui a fini d’être le lot de ses habitants tous les jours.
La pénurie d’eau devient, de plus en plus, intenable dans la capitale dakaroise et sa banlieue. Si le mois dernier les populations des Parcelles assainies sont sorties en masse dans la rue pour crier leur ras-le-bol et interpeller les autorités sur leur mal-vivre, à Grand-Yoff, quartier populeux, le liquide précieux peine à couler normalement.
En cet après-midi, du mardi 3 juillet 2018, l’ambiance est au rendez-vous à la cité Millionnaire. Difficile de se frayer un chemin sur la voie qui mène vers l’église Saint-Paul, à cause des étals des marchands qui ont fini d’occuper toute la rue. Le vrombissement des moteurs des «cars rapides» qui dégagent de la fumée noire mélangée à la musique distillée de partout complètent le décor. Devant la maison de la famille Gomis, les enfants jouent au foot à côté d’un caniveau à ciel ouvert qui dégage une odeur nauséabonde. A l’entrée de la porte principale, des bidons de 20 litres remplis d’eau sont superposés. Un constat qui renseigne à suffisance sur les conditions d’existence dans cette localité. Assise sur un banc en bois, la mère de famille, Céline, discute tranquillement avec sa fille aînée, Agnès. Elle ne se fait pas prier pour informer que, pour se procurer de l’eau, il faut veiller jusqu’à 3 heures du matin pour espérer avoir quelques litres et pouvoir se laver le matin. «C’est très dur. Nous vivons cette situation depuis des mois. Et pourtant nous payons les factures d’eau. Un centime qui manque, ils viennent couper le lendemain avec un bon de coupure de 4 mille F Cfa. Ici, il est très difficile d’avoir de l’eau la journée. Les robinets ne commencent à couler qu’à partir de 3 heures du matin», renseigne-t-elle. La soixantaine, la bonne dame soutient que cette situation commence à perdurer. Et elle risque d’empirer, note-t-elle, avec la chaleur qui s’installe progressivement.
A quelques encablures de la demeure des Gomis, Ousmane Sarr, mécanicien, habite dans un vieil immeuble blanc. Ici, l’eau du robinet ne coule plus depuis des mois. Pour préparer le repas et prendre le bain, les locataires sont obligés de s’approvisionner auprès des charretiers qui font souvent la ronde dans le quartier. Ce, à défaut d’acheter les bouteilles de 10 litres chez le boutiquier du coin. «Pour boire, j’achète tous les deux jours une bouteille de 10 litres d’eau à la boutique. Pour prendre une douche, j’attends le charretier. J’avoue que ce n’est pas facile quand-même. Auparavant, je partais au boulot à 8 heures. Maintenant, je suis obligé de rester jusqu’à 10 heures pour pouvoir prendre un bain», martèle le jeune homme.
Grand-Yoff n’est pas seul dans son calvaire. Aux Hlm du même nom, c’est presque la même situation que vivent les populations. L’eau du robinet se fait de plus en plus désirer. A la cité Kérétou, les populations rencontrent d’énormes difficultés pour préparer le repas ou faire le linge. «Je suis souvent en retard à mon travail parce que je veille jusqu’à 2 heures du matin pour remplir mes bidons avant de me coucher. Sinon je risque de ne pas me laver lendemain. Mais ce qui m’étonne dans tout ça, c’est que nous vivons cette situation depuis des mois. Mais, on n’entend aucune autorité se prononcer là-dessus, ni le ministre de l’Hydraulique, ni la Sde et les factures restent salées», fustige Ibrahima Ndiaye rencontré devant l’école Les Pédagogues.
Samba BARRY