La renonciation fiscale n’est pas de 50 milliards de francs Cfa. L’assurance est du ministre de l’Economie, des Finances et du Plan, Amadou Bâ, qui faisait face aux députés dans le cadre de la traditionnelle question d’actualité au gouvernement. Selon lui, ces pertes fiscales pour aider les entreprises se chiffrent plutôt à 11 milliards.
C’est la guerre des chiffres entre le ministre des Finances et le syndicat des agents des impôts et domaines. Là où les syndicalistes alertaient, en conférence de presse, la semaine dernière, sur les renonciations fiscales qui avaient atteint 50 milliards, Amadou Bâ a rabaissé la facture. Face aux parlementaires, hier, lors d’une question d’actualité au gouvernement, l’argentier de l’Etat a précisé qu’en 2015, le niveau de renonciation est de 11 milliards de francs Cfa. Sur cette manne financière, il renseigne que 4 milliards concernent les Industries chimiques du Sénégal (Ics). Toutefois, il a indiqué que ces chiffres doivent être affinés par ses services.
Ainsi, le ministre de l’Economie, des Finances et du Plan a estimé que le Sénégal a un système fiscal très solide. D’abord, explique-t-il, c’est la deuxième performance au niveau de l’Uemoa en ce qui concerne la pression fiscale qui se situe à 19 %. Mais aussi, le premier dans l’union à avoir fait une étude sur les dépenses fiscales. Selon M. Bâ, le Sénégal évalue et publie chaque année le niveau exact des renonciations fiscales. «Vous verrez dans le site de la Direction générale des impôts et domaines les résultats de l’année 2012. Le rapport de 2013 est disponible, il fait l’objet de validation au niveau du comité technique tout comme j’ai donné l’instruction pour que les rapports de 2014 et de 2015 fassent l’objet d’études et de publications. Cela veut dire que toutes les dépenses fiscales, toutes les renonciations totales, partielles d’impôts, sont analysées, étudiées et publiées», a-t-il indiqué.
Le ministre estime qu’il ne faut pas se limiter à l’impact budgétaire de ces renonciations. A l’en croire, il faut regarder l’impact budgétaire mais aussi l’impact économique et social de toutes les mesures. «Actuellement, au niveau national, le niveau de dépenses fiscales tourne autour et à peu près égal au déficit budgétaire. Donc, c’est plus de 300 milliards de francs d’exonération ou de renonciation qui sont octroyées chaque année», a confié le ministre. D’ailleurs, il a précisé aux parlementaires que ces renonciations fiscales ne souffrent d’aucune irrégularité. Car, soutient-il, ce sont les parlementaires qui adoptent la loi qui l’autorise. «Dans beaucoup de pays, il y a des renonciations de cette nature. Il y a maintenant le cas des entreprises qui peuvent avoir des difficultés. Vous avez parlé d’un chiffre de 50 milliards que j’ignore totalement», s’est défendu le ministre des Finances. Qui, en outre, annonce que derrière ce débat, il y a plusieurs choses qu’il faut comprendre. «Faut-il laisser l’ensemble des prérogatives de droit de vie ou de mort à la disposition, entre les mains, de certains fonctionnaires. Je pense que non. C’est une procédure encadrée et autorisée par la loi. Ces dispositions permettent à un citoyen, un contribuable, de solliciter la bienveillance de l’administration. L’administration réclame au temps T, des impôts qui auraient dû être payés quatre ans plus tôt. La situation de l’entreprise a eu le temps de changer», a dit le ministre. Qui rappelle que le Sénégal est dans un processus de relance de l’économie. Non sans rappeler que dans la pratique, de Peytavin à lui-même, tous les ministres de Finances et directeurs généraux ont eu à user de cette disposition. Par contre, ajoute-t-il, cette disposition n’était pas encadrée par la loi. L’autorité le faisait, argue-t-il, de manière discrétionnaire. «Il y a cinq ans ou six ans, il y a eu une mesure d’amnistie générale pour la presse. Cette mesure n’était pas encadrée par la loi. Tout comme aujourd’hui, dans le secteur du tourisme, on a eu à le faire. Donc, retenez que l’ensemble des entreprises est concerné. Retenez que tous les dossiers sont étudiés par les services de bas en haut. Le ministre ne se donne pas cette prérogative», a conclu Amadou Bâ.